Le sujet d’inclusion des personnes handicapées dans la lutte contre le changement climatique revêt plus d’intérêt autant qu’il suscite des questionnements intarissables. D’un contexte à un autre, les perspectives pour inclure les personnes handicapées dans le débat climatique montrent des réalités différentes. La spécificités des différents handicaps rend encore plus sensible et complexe le sujet. Ainsi, au plan international, national et même au sein des organisations de la société civile, les préoccupations interrogent diversement les défis d’inclusions des personnes handicapées pour atteindre significativement la justice climatique. Il est donc plus évident qu’il ne peut y avoir de justice et encore moins de justice climatique sans la prise en compte de toutes les composantes de la société. Les fondements juridiques de cette inclusion et les mesures pratiques d’adaptations appellent à la combinaison de plusieurs méthodes. La politique climatique actuelle des Nations Unies, les outils internationaux, le travail d’organisation de la société civile et le numérique malgré sa complexité pour certains types de handicaps sont explorés dans cet article comme une solution à ce défis d’inclusion.
LES NATIONS UNIES
Au niveau international, les choses évoluent lentement pour intégrer les préoccupations des personnes handicapées dans les débats sur la justice climatique. Le 12 juillet 2019, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a adopté une résolution sur les liens entre les droits de l’homme et le changement climatique, qui aborde explicitement la situation et la protection des personnes handicapées face au changement climatique. La résolution a demandé au Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme de réaliser une étude analytique sur la promotion et la protection des droits des personnes handicapées dans le contexte du changement climatique et de tenir un panel sur le même sujet lors de la 44e session du Conseil des droits de l’homme. Pour ce faire, un questionnaire a été envoyé aux États membres, aux organisations non gouvernementales, aux organisations intergouvernementales, aux institutions académiques et aux institutions nationales des droits de l’homme afin d’évaluer leur niveau de connaissance. L’étude a été publiée en avril 2020. Les Nations Unies y résument les points importants concernant les domaines de vie et les interactions dans lesquels le changement climatique a un impact sur la vie des personnes handicapées. Ils constatent que les droits des personnes handicapées sont déjà ancrés juridiquement dans les règlements sur le climat. Et ils font des propositions sur la manière dont les personnes handicapées peuvent devenir plus actives face à la crise climatique. Les résultats fournissent des informations supplémentaires sur les bases juridiques internationales. L’exigence d’intégrer les personnes handicapées dans les débats sur la justice climatique rappelle les revendications du mouvement international des droits des personnes handicapées depuis des décennies et concernent déjà la vie quotidienne:
1) Participation active, libre et significative des personnes handicapées et leur auto-représentation dans tous les processus de décision politique.
2) Non-discrimination dans toutes les actions contre le changement climatique.
3) Accessibilité de l’information.
4) Perception des droits des personnes handicapées dans les débats sur le changement climatique.
Le panel de 2020 a conclu que l’action contre le changement climatique devait toujours se fonder sur les droits de l’homme et, dans le cas des personnes handicapées, être menée conformément aux dispositions de la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées. Il reste à voir quelles mesures seront prises dans les résolutions et programmes suivants pour lutter contre le changement climatique dans l’intérêt des personnes handicapées.
GLOBAL LIFE GOALS:
Les objectifs de bonne vie proposent des mesures personnelles que chacun peut prendre pour soutenir les Objectifs de Développement Durable (ODD). Ainsi, les « objectifs de bonne vie » présentent pour chaque ODD cinq exigences concernant le mode de vie des individus. Ces mesures sont soigneusement alignées sur les cibles et indicateurs des ODD. Elles doivent avant tout aider les décideurs politiques, les entreprises, la société civile, les créateurs et les pédagogues à faire connaître les ODD aux personnes qui les entourent et à agir en conséquence. Cliquez ici pour en savoir plus (voir fichier PDF en allemand).
Afin d’être cohérent et d’atteindre un public aussi large que possible, chaque objectif pour une vie bonne est structuré de manière similaire. Il y a un titre très simple, suivi de cinq mesures: La première mesure est une tâche « d’apprentissage ». C’est la mesure la plus accessible et même pertinente pour les enfants ou les personnes ayant un contrôle limité sur leur propre mode de vie. Les trois mesures suivantes posent des défis plus importants en termes de changement de comportement, en termes de mode de vie, coûts, habitudes. Au moins une mesure est si possible positive, gaie, optimiste, drôle. L’avant-dernière mesure est la plus pertinente pour la classe moyenne, notamment les surconsommateurs – c’est la mesure la plus difficile. La dernière mesure vise à encourager les changements de la part des leaders politiques, économiques et sociaux.
NUMÉRIQUE ET COMBINAISON DE MÉTHODES
Le monde est en pleine mutation. Nous sommes au cœur d’une crise climatique, la numérisation progresse à un rythme effréné et nous constatons partout dans le monde des discriminations et des inégalités. La combinaison de l’inclusion et de la numérisation pourraient être une bonne solution pour inclure davantage de personnes handicapées. La numérisation est très importante pour cette première étape de l’évaluation des risques liés au changement climatique. Si nous utilisons la technologie dont nous disposons, les gens pourront peut-être être mieux informés. C’est ce que nous devons faire. En ce qui concerne le concept de services écosystémiques, la numérisation est également importante et peut être très utile. Mais pour protéger la nature, nous ne devons pas perdre le contact avec elle sous cette forme pure à laquelle nous sommes habitués. C’est très important pour notre bien-être. Nous plaidons aussi pour un accès à l’information sans barrières et faisons référence au système des sens: au moins deux des trois sens « vue », « toucher » et « ouïe » doivent être sollicités. Il serait alors possible d’atteindre une grande partie des personnes. Cela est notamment possible grâce à la langue des signes ou sous forme de texte adapté aux lecteurs d’écran. Les avertissements en langage simple sont également une solution. Le langage facile s’oriente vers les personnes ayant des difficultés d’apprentissage, il renonce aux phrases longues et aux formulations compliquées. Plus c’est court et simple, plus c’est compréhensible, telle est la devise. Voici comment mieux informer sur la crise climatique.
EXPÉRIENCE DE LICHT FÜR DIE WELT – Lumière pour le monde:
Lumière pour le monde est une organisation internationale spécialisée dans le développement inclusif. Leur objectif est une société inclusive, ouverte à tous et qui ne laisse personne de côté, s’engageant pour des soins ophtalmologiques accessibles et soutenant une éducation et des conditions générales inclusives pour une vie autodéterminée, afin que les personnes handicapées puissent participer à la société sur un pied d’égalité. Licht für die Welt est organisée en tant qu’association indépendante à but non lucratif et possède des bureaux nationaux en Éthiopie, au Burkina Faso, au Mozambique et au Soudan du Sud. Avec leurs programmes, ils renforcent les droits des personnes handicapées, leur permettant de mener une vie autonome et les aidant à sortir de la pauvreté.
Pour Licht für Die Welt aussi, la crise climatique et la destruction de l’environnement sont des défis majeurs. En effet, les problèmes consécutifs à ces évolutions globales font que l’organisation spécialisée doit trouver des réactions efficaces aux catastrophes actuelles et à venir. Ainsi, Licht für Die Welt a apporté son aide au Mozambique, touché par la tempête tropicale Idai, par des inondations massives et par la pandémie COVID-19 et le lockdown qui en découle. Au Burkina Faso et en Éthiopie, des personnes handicapées et leurs familles ont également reçu de l’eau potable, de la nourriture et des produits d’hygiène. En Inde, l’organisation soutient des projets agricoles qui protègent l’environnement et la biodiversité et garantissent aux personnes un revenu stable.
STATISTIQUES
Concernant le traitement des citoyens souffrant d’un handicap mental et de troubles du développement, il faudra informer sur les causes et la gravité du handicap mental et faire comprendre au public en général et aux familles d’accueil en particulier les modalités du traitement des citoyens handicapés. Elles devraient faire l’objet de statistiques et nous appelons les membres influents de la société à jouer un rôle approprié pour changer les attitudes et les croyances erronées du public à l’égard du handicap.
Nous attirons l’attention sur le fait que les citoyens souffrant d’un handicap mental ou de troubles du développement ont été confrontés à d’énormes défis dans le passé, en raison du manque de compréhension du public. Des efforts devraient être faits pour aider les citoyens handicapés et soutenir les personnes qui s’occupent d’eux. Le handicap exige des connaissances approfondies et de la persévérance. Nous invitons les institutions publiques à jouer leur rôle en favorisant la compréhension du public.
En somme, la protection du climat et de l’environnement est meilleure lorsqu’elle est « inclusive ». Mais que signifie le mot inclusif? En réalité, il s’agit ici de lutter ensemble contre la catastrophe climatique en intégrant les perspectives et les intérêts des personnes handicapées. Prendre des mesures efficaces plutôt que de tomber dans un activisme peu utile et souvent même nuisible.
Contribution de King Matunguru sur l’expérience de l’INAM asbl (participant de la RDC congé)
L’Initiative pour l’Avenir Meilleur, en sigle « IN.A.M. » est une association sans but lucratif, de droit congolais initiée depuis 2006 au Sud-Kivu, en République Démocratique du Congo. Elle vise d’une part la promotion, la protection et la défense des droits des personnes handicapées ainsi que leur intégration sociale, économique, politique et culturelle. D’autre part, elle travaille pour l’éducation, la promotion de valeurs humaines et l’éradication de toutes formes de discriminations sociales. A travers des actions de lobbying et des projets communautaires l’INAM œuvre dans la recherche inlassable des solutions aux difficultés de subsistance et d’auto développement des personnes handicapées. Pour renforcer la participation et l’auto-représentation des personnes handicapées dans les instances décisionnelles, l’INAM a mené un plaidoyer et a obtenu un appui financier de IRI ( International Republican Institute) et NED ( National Endowment for Democracy) pour faire la sensibilisation sur la participation et inclusion de la notion ‘’handicap et genre’’ dans le processus électoral de décembre 2023. De même, l’INAM mène à l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) des missions humanitaires d’aide des personnes handicapées en période de crise climatique et de conflits armés. La situation dans laquelle évolue l’INAM est complexe en RDC en général et à l’Est du pays en particulier car, non seulement la RDC est aussi victime du réchauffement climatique mais aussi plus des menaces de nombreux autres défis humanitaires entraînés par des conflits de groupes armés internes, des catastrophes naturelles ( inondations, dévastations de ses forêts par les organisations de prédation étrangères…). Tout ceci ne fait qu’accroître le nombre de victimes personnes handicapées. Comprenez donc que dans le contexte de la RDC à l’Est, le combat devrait être sur tous les fronts pour anéantir de prime abord les auteurs des atrocités qui ne font qu’accroître le nombre de personnes handicapées.
La situation humanitaire en RDC depuis Mars 2023 fait état de 6.8millions personnes en besoins humanitaires aiguës selon le Chargé de la question humanitaire à l’ONU. Toutes ces personnes sont à 95% dans les provinces de l’ITURI, NORD-KIVU et SUD-KIVU ( partie Orientale de la RDC). INAM voulant à tout prix donner du sourire aux personnes vulnérables, se trouve donc débordée mais ne lâche pas. Dans ce sens, l’INAM a lancé un projet ambitieux de construction d’un grand centre des formations professionnelles multidisciplinaires pour permettre que les personnes marginalisées puissent acquérir des connaissances, en vue de leur autonomisation et auto-prise en charge.
Le réchauffement climatique par la dévastation des forêts de la RDC s’accroît davantage alors que le pays était envisageable comme pays solution avec son bassin hydrographique riche et ses forêts denses après l’Amazonie. Ainsi face à ces menaces préméditées, l’INAM pense à l’importance de se souder les coudes et travailler à l’unisson car tous nous sommes sous menace permanente d’être de futures handicapés.
par Dr Amina Tall, dans le cadre du projet AVOUALI ‘’Inclusion en temps de crise climatique’’ initié par MeineWelt e.V. avec le soutien financier de Aktion MENSCH